L’effet boomerang sera terrible car lorsque les
Espagnols, comme les autres, s’apercevront que ces plans
ne peuvent pas marcher et sont synonymes de toujours
plus de souffrances, ils renverront leur rancœur vers
leur démocratie, vers l’Allemagne et vers l’Europe. Les
nations d’Europe ne sont pas l’Allemagne et n’ont ni la
vocation ni la faculté de devenir de petites Allemagne.
Quand le comprendra-t-on ?
La réaction du peuple allemand sera terrible elle aussi,
quand il commencera à comprendre que la machine à
éponger la dette des autres est sans fin.
Car le vrai problème est économique. Le nouveau pacte de
stabilité, cette espèce de « super-Maastricht », ne
produira aucun résultat. Il va plonger les économies
dans un cercle vicieux récessif, sans leur donner, en
l’absence de dévaluation, la capacité de rebond. On va
tout simplement transformer de l’endettement en
surendettement !
Les touristes ne se presseront pas en plus grand nombre
en Espagne ou en Grèce. Le retard de compétitivité
industrielle va s’accroître, faute d’une dynamique
d’investissement des entreprises. Les déficits
commerciaux vont se creuser. L’écart avec l’Allemagne va
s’accroître, et ces pays ne pourront pas rembourser la
dette.
La France et l’Italie, quant à elles, sans être encore
placées dans cette extrémité, vont s’épuiser dans une
sous-croissance, une croissance molle, aboutissant à une
dégradation continue de leurs finances publiques et une
augmentation sans fin de leurs souffrances économiques
et sociales.
Cette situation économique va bien sûr aboutir à une
réaction sociale et à des troubles politiques majeurs,
sauf à considérer que les peuples peuvent accepter de
voir l’Allemagne se renforcer éternellement à leur
détriment, de voir les activités industrielles se
concentrer au nord de l’Europe et de transformer tout le
reste en un parc d’attractions de funeste mémoire.
Il va de soi que ce fameux « pacte de compétitivité »
subira le sort du précédent pacte de stabilité, qui n’a
jamais été respecté et a même été violé par ses deux
principaux concepteurs, l’Allemagne et la France !
La méthode Coué est parfois nécessaire en politique,
elle ne n’est jamais durablement efficace en économie.
Les dirigeants européens ne veulent pas admettre qu’une
monnaie unique ne peut pas fonctionner avec des
économies dissemblables et des démocraties nationales.
Les Allemands veulent gagner sur les deux tableaux,
profiter de l’euro en évitant les dévaluations de leurs
concurrents, mais ne pas assurer de transferts
financiers en soumettant ces derniers à un régime de
fer. Au lieu de les guérir, on va les maintenir
indéfiniment en respiration artificielle !
Ce faisant, ils ne laissent comme choix aux autres pays
que de mourir à petit feu ou sortir de l’euro à grand
fracas. A force de vouloir maintenir coûte que coûte
l’euro dans sa forme actuelle, sous le faux prétexte de
sauver l’Europe, Madame Merkel et son collaborateur si
déférent, Nicolas Sarkozy, prennent le risque immense de
fracasser l’Europe.
C’est une faute historique car justement, la
construction européenne n’a pu être engagée que sur la
base d’une réconciliation des Nations et, concernant
deux des principales d’entre elles, la France et
l’Allemagne, sur le principe de leur parité. Ainsi,
aligner toute l’Europe sur un seul de ses pays n’est pas
construire la « Maison commune » qu’espèrent depuis un
demi-siècle les Européens. C’est au contraire revenir
aux pires travers de l’histoire européenne.
La France et l’Allemagne ont réussi jusqu’à l’euro à
marcher main dans la main car l’une avait pardonné
tandis que l’autre acceptait de ne plus dominer. A
partir de Maastricht, la France a cessé de faire valoir
ses intérêts auprès de sa voisine, croyant s’attirer ses
bonnes grâces mais ne parvenant qu’à sacrifier son rang
et à déstabiliser tout le continent. Comme l’avait
prophétiquement averti Philippe Séguin dans son Discours
pour la France, ce n’est rendre service ni à notre pays,
ni à l’Europe, ni à l’Allemagne elle-même, que de
laisser cette dernière prendre un ascendant excessif sur
le continent. Ce nouveau réflexe de puissance et cette
nouvelle soumission française, qui en rappelle hélas
d’autres durant notre histoire, ne peuvent qu’alimenter
une terrible réaction en chaîne.
Les apprentis sorciers qui se vantent de n’avoir aucune
culture historique, qui ne respectent pas les peuples,
qui sont myopes, porteront une très lourde
responsabilité devant l’Histoire.
Plus que jamais, 2012 sera le combat de la liberté de la
France et de la concorde en Europe !
Nicolas DUPONT-AIGNAN
député de l'Essonne
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