Nicolas attend des voix
par Gilbert
Collard
À
mon père, notaire à Vaucouleurs, qui fit
baptiser sa fille Jehanne à Domremy.
Si Paris vaut bien une messe, l’élection
présidentielle vaut bien un tartuffard
pèlerinage politique à Domrémy – la-
Pucelle, effectué à dos de sondages
fatigués, par le tictaquant troubadour de
l’agonie historique française, Nicolas
Sarkozy.
Sous sa présidence ont été chassés à coups
de balai de nos livres scolaires Saint
Louis, Louis XIV, Molière, et bien d’autres.
Notre identité, notre indépendance, notre
culture, notre histoire, notre langue (qu’il
fredonne, plus qu’il ne parle), nos
traditions ont été bafouées, maltraitées.
Un sursaut de Guéant, de Ciotti, pour donner
le change, ne trompe personne. Avec Georges
Pompidou, Nicolas Sarkozy est le seul
président de la Vème République à n’avoir
point assisté aux fêtes de Jeanne d’Arc le 8
mai suivant l’élection.
Et aujourd’hui, jockey ? cycliste ?
Chevauchant à urne rabattue son destrier
électoral, derrière Marine le Pen, à la
poursuite de son électorat, il découvre que
Jeanne d’Arc, ce qui est une bonne surprise,
peut rapporter, c’est le cas de le dire, des
voix ! Alors, sus à Domrémy, sonnez matines.
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Il y aurait encore des Français pour s’intéresser à
l’histoire charnelle de la France ? Eh oui, n’en
déplaise aux mondialistes nombrilistes accueillantistes
: « La lecture des sondages montre clairement le
maintien de la présence de Jeanne d’Arc dans les
mémoires et l’absence de toute autre héroïne. » (Alain
Corbin, P 70, Seuil).
Mais du Fouquet’s à la chapelle du bois chenu édifiée à
l’endroit où Jeanne entendit les ordres de Saint Michel,
de Sainte Marguerite et de Sainte Catherine, il y a du
chemin à parcourir pour être crédible face à la croyante
en Dieu et en la France, cette « femme sans sépulcre et
sans portrait », qu’admirait Malraux. Nul qui résista un
jour pour la France ne put s’empêcher de penser à elle.
Croyante En Dieu ? C’est une affaire de foi, et là,
chacun est libre d’y croire ou d’en douter, sans se
moquer, en n’oubliant pas, s’il doute, ces mots
testamentaires de Vaclav Havel : « Il semble que la
chose la plus importante aujourd’hui serait d’adopter
une attitude humble à l’égard du monde, de respect en ce
qui nous dépasse, de tenir compte du fait qu’il existe
des mystères que nous ne comprendrons jamais et de
savoir qu’il faut assumer notre responsabilité sans la
fonder sur la conviction que nous savons tout… nous ne
savons rien, mais l’espoir nul ne peut nous l’ôter. »
Croyante En la France ? Jeanne, qui signait Jehanne,
c’est l’amour de la France ! Nul n’en peut douter. Il
fallait vraiment le génie de notre peuple, quand il
rêvait en lui, pour réussir ainsi à prophétiser
l’exigence de vérité, pour trouver dans ses marches les
plus lointaines, les sauveteurs de ses aspirations
opprimées : une bergère, une pauvresse : Jeanne, l’épée
de Charles Martel au poing. Comme , dans notre histoire,
Sainte Geneviève et ses prières ; Gambetta, fils
d’immigré et son dirigeable, qui de Tours continue la
guerre ; Clémenceau et sa volonté ; de Gaulle et son
appel ; Jean Moulin et ses ombres.
Des femmes, des hommes inspirés par l’amour fou du pays
ont accompli cette personnification rebelle qui seule se
dresse contre l’asservissement, l’envahissement, le
renoncement !
Seuls, toujours contre tous : contre les ayatollahs de
toutes les chapelles laïques, ecclésiastiques,
philosophiques, politiques, juridiques, ironiques…
Seuls, toujours seuls, jusqu’au bûcher des flammes de
l’oubli, de l’ingratitude, de l’enfer. Seuls contre les
combines des « Français reniés », les collabos d’alors,
du temps de Jeanne, autre temps, autres traîtres, qui ne
croyaient pas en la France, les sales cons ! Et
pourtant, elle l’a bien foutu en l’air l’imprenable
bastille des Tourelles, contre l’avis de tous, vêtue de
son armure blanche, brandissant glaive et étendard,
accompagnée d’abord par le peuple et ensuite par les
chevaliers et capitaines. Le peuple, qui en avait marre
d’être occupé, a chargé !
Elle n’est à personne Jeanne, ni à la droite ni à la
gauche ; elle est à celles et ceux qui y croient,
surtout en dehors des périodes électorales, et qui lui
rendent hommage parce qu’il faut se souvenir « que la
patrie chez nous est née du cœur d’une femme, de sa
tendresse et de ses larmes, du sang qu’elle a donné pour
nous », comme le disait Michelet.
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Gilbert
Collard est avocat au
Barreau de Marseille, ancien
secrétaire de la conférence
et Chevalier des Arts et
Lettres. Il est Président du
MOSC (Mouvement pour
l’Organisation de la Société
Civile.
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