Le
pendule des faux-culs
par
Gilbert Collard
Quelque chose d’un ordre encore secret se
passe, qui ne transparait, à travers les
nuages des mensonges officiels, que par des
signes, voire des intersignes.
Les politiques, je veux dire ceux dont le
métier est de durer sur les décombres qu’ils
ont amoncelés, cherchent à rattraper le
retard, qui est leur propre retard.
Entrepreneurs en démolition, ils tentent de
recoller les morceaux d’une âme qu’ils ont
déchirée avec le couteau de la démagogie, de
la langue de bois, de la peur de déplaire à
une intelligentsia qui terrorise la vérité.
La France ordinaire, qui est extraordinaire
dans sa tâche quotidienne, épuisante, qui
court après les fins de mois, qui se
rattache, malgré tout, dans un enracinement
dynamique, à une force vitale qui est
l’amour fraternel du pays, chante tout bas
ce qu’on a étouffé tout haut. Deux Français
sur trois se disent prêts à payer plus cher
pour les biens industriels fabriqués dans
l’hexagone, plutôt qu’hors d’Europe. Selon
le CREDOC, 64% veulent favoriser l’achat
local, même les plus pauvres, par quête du
sens. On veut privilégier le « made in
France ». On aime la France ! C’est beau,
comme une vieille histoire, qui raconterait
les retrouvailles, malgré des maîtres
d’internat internationalistes, d’un frère et
d’une sœur séparés par des faussaires.
|
! |
C’est émouvant, et cela en dit long sur la France qui ne
se lève ni tôt ni tard, qui n’est ni d’en haut ni d’en
bas, mais qui a envie d’Être, simplement d’Être, dans la
simplicité d’un geste qui n’est porté par aucune
publicité, par aucun marketing, par aucun repliement,
mais seulement par cette intuition noble, ridiculisée
par des cons sonores confis en contrition
électoralistes, que la France a besoin d’être aimée.
Comme même les sourds entendent quand ils ont à
l’oreille le sonotone d’une élection présidentielle,
voilà le réveil ébouriffé des sourds ahuris par la
lumière de la réalité. Et l’on voit surgir des draps les
fantômes, les fantoches qui pendant des années ont
méprisé ce peuple qu’il croyait endormi, persuadé qu’ils
étaient qu’il continuerait à ronfler dans le
ronronnement des racontars politiques d’un Mitterrand,
d’un Jospin, d’un Chirac, d’un Sarkozy, au coin d’un feu
de bois en forme d’écran. Le réveil est dur ! Alors on
enfourne quelques buches, histoire de montrer qu’on est
bucheron des chênes qu’on abat.
Dernière buchette dans la maison glaciale depuis des
années, la mission d’information sur le droit de la
nationalité. Claude Guosguen, rapporteur de la mission,
député UMP, s’explique dans le Figaro, un grand moment
de rétropédalage racoleur. Bientôt, ils vont dormir dans
des draps bleus, blancs, rouges ! « La nationalité doit
être une adhésion à une nation et à ses valeurs. 130 000
naturalisations par an, c’est trop. » Je l’avais déjà
entendu dire, mais ça faisait fasciste dit par une
autre… Maintenant, c’est républicain ! « On est pour
l’OM ou pour le PSG. L’identification à la France vient
en dernier. L’identification ne doit pas être seulement
géographique, mais s’inscrire dans une histoire et des
valeurs. »
L’Histoire et ses Valeurs ? Quel est ce vocabulaire ?
On appelle l’Histoire de France à la rescousse après
l’avoir insultée, méprisée, interdite de parole.
On appelle les valeurs au secours après les avoir
systématiquement dévalorisées en stigmatisant d’opprobre
les insultés qui voulaient les défendre, des
réactionnaires, des bérets basques, des fluteurs de
pain, des cons, interdits du canapé rouge drukerien
souillé par tous les culs mondains du parisianisme qui
palabre dans le conformisme béni.
Attendez, le ventriloque n’a pas fini de ventriloquer,
une autre voix parle en lui, qu’on refusait d’entendre :
« Nous devons renouer avec notre roman national et
donner à nos enfants une véritable culture de base de la
Nation. Notre éducation nationale est devenue en quelque
sorte de moins en moins nationale. Les élèves pourraient
commencer par apprendre, par exemple, l’hymne
national. »
C’est de la contrefaçon ! Que ne l’avez-vous
dit avant ? Il vous faut la trouille des urnes
funéraires pour condescendre à dire ces évidences, hier
encore bannies du discours officiel. Donc vous saviez…
Lâche ! Trouillard ! Peureux des mots, peureux de
France ! Même le service militaire revient à la mode, sa
suppression ayant été la pire des choses du point de vue
de la fraternisation d’ensemble d’une population. Encore
Chirac, l’irréprochable nez républicain qui ne supporte
pas les odeurs. Même la double nationalité est un
« problème », maintenant !
N’en faites pas trop, monsieur Goasguen, n’oubliez pas
La Fontaine, et la fable de l’âne et du petit chien :
« Ne forçons point notre talent,
Nous ne ferions rien avec grâce,
Jamais un lourdaud quoi qu’il fasse,
Ne saurait passer pour galant. »
Ne bourrez pas vos urnes avec les idées des autres,
elles vont vous exploser au visage ! Que c’est drôle de
voir les donneurs de leçon apprendre la leçon… Et
n’oubliez pas dans votre frénésie de Nation de respecter
tout le monde. Une nation, elle est d’abord ce que ses
représentants en font. Qu’avez –vous fait de la France,
médecins tardifs, croque-morts d’un trépas dont vous
êtes les seuls responsables ?
Gilbert Collard
|
L’ auteur
Gilbert Collard est avocat au Barreau de Marseille, ancien secrétaire de la conférence et Chevalier des Arts et Lettres. Il est Président du MOSC (Mouvement pour l’Organisation de la Société Civile).
Visitez son blogue en cliquant sur ce lien