Une expression qui appelle à la
liberté
de pensée, à la liberté
d'expression que la République a
souvent défendue et qui sont
maintenant foulées aux pieds par
des "Big Brother" de la pensée.
Léo Ferré chantait
"Ces
bois que l'on dit de justice et
qui poussent dans les supplices
et pour meubler le sacrifice
avec le sapin de service, cette
procédure qui guette ceux que la
société rejette sous prétexte
qu'ils n'ont peut-être ni Dieu
ni maître".
Maître
Gilbert Collard semble en tout
cas de la trempe
à appartenir à ceux qui
rejettent l'oppression et la
police de la pensée, si souvent
clamée par ce chanteur
anarchiste que l'on ne peut
s'empêcher d'aimer. Moi, j'aime
Maître Collard pour son parcours
de sincérité.
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« Braves gens prenez garde aux choses
que vous dites, tout peut arriver d’un mot
qu’en passant vous perdîtes. ». |
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Victor Hugo était loin de se douter de l’importance que cette mise en garde aurait un siècle plus tard, à l’époque épique de l’hypermédiatisation.
Au champ d’honneur de la parole libre et malséante, Jean François Khan vient de tomber, frappé en plein front par le rebond de ses propres mots. À propos de l’affaire DSK, dans un moment d’expression, peut – être, de son inconscient, il a lâché : « Si c’est un troussage domestique, ce n’est pas bien. » Phrase insupportable par le mépris suranné qu’elle exprime de la bonne à tout faire et à tout subir. Là-dessus on est d’accord. J’ai critiqué, comme tout le monde, dans la fosse d’aisance collective de la réprobation, cette réflexion abaissante.
J’apprends avec tristesse que le fondateur de Marianne, le journaliste courageux, brise sa plume comme le soldat l’épée, fatigué et écoeuré. J’ai souvenir d’une remarquable étude de Jean François Khan sur le lynchage médiatique. Il est passé, hélas, de la théorie à la pratique ! Son journal ne m’a jamais épargné, souvent injustement, sans me donner le droit de répondre. Ce qui m’autorise à dire ce que j’ai sur le cœur. Comment en est-on arrivé là, pour qu’une phrase, un mot déplacés deviennent l’acte d'accusation de toute une vie qui les dément ?
On paye aujourd'hui le prix d’une police des mots en place depuis des années avec ses chiens policiers prêts à mordre l’os d’une phrase, à la première occasion.
On est tous, plus ou moins, les inspecteurs de cette inquisition verbale ou l’erreur, l’approximation, n’est plus permise, ni pardonnable. En France, on ne peut plus rien dire sans aseptiser sa parole, sans la tremper dans le bénitier médiatique, sans la terreur de déclencher une tornade morale contre soi au nom de la bien-pensance et du conformisme. Des associations, dont on ne connaît même pas le nombre d’adhérents, se professionnalisent dans l’action judiciaire systématique, n’ayant plus pour terrain d’action que le tribunal et les dommages et intérêts….
Jean François Khan a balancé une connerie, il s’en est excusé, qui n’en dit pas ? Je lui accorde le droit à l’erreur et à l’amitié, lui qui souvent ne l’accorda pas aux autres. C’est peut-être le défaut nécessaire du polémiste. On étouffe dans ce pays, autrefois de liberté. On a peur de ce qu’on dit, d’être enregistré, d’être répété, on a peur de parler. Seuls les régimes totalitaires bâillonnent à ce point la parole. On a tout fait pour arriver, au nom de l’égalité et de la justice, à cet étouffement. La plupart des sujets sont tabous,
Zemmour en a fait l’expérience. Il est, du reste, viré de l’émission de Ruquier avec Naullaud, son complice de l’autre bord. Il n’y aura plus que le chuintement des pantouflards dans les médias français qui potineront prudemment d’une grossesse essentielle au pays dans le ton convenu des bons sentiments. On en est là. On n’ose pas dire qu’on voterait pour le front national, c’est mal vu ! Alors on se tait, mais on n’en pense pas moins. Il faut, paraît-il, du courage pour oser avouer qu’on est ami avec Marine Le Pen… Et, l’air de rien, on vous le reproche, dans les sphères irréprochables, comme si on se rapprochait d’un maléfice. C’est du Vaudou médiatique. Quel pays ! Je devais signer
mon dernier livre dans les salons de la banque suisse Swiss Life. Elle m’a fait savoir du haut de son minaret qu’elle ne veut pas, que mon amitié avec Marine Le Pen rendait ma présence indésirable. Cela étant, vu ce que certaines banques suisses on fait aux biens des juifs, je pense que ce sont elles qui sont infréquentables ! Une chape de plomb écrase la liberté de penser au nom d’un moralisme préfabriqué par des années de conditionnement politique et médiatique destiné à maintenir en place le même système et les mêmes lâches. Merde, je viens de commettre le délit d’expression populiste…
Jean François Khan reprochait à Zemmour « De réhabiliter une vision réactionnaire du monde. » Je ne le crois pas. Et même, si c’était vrai, qu'est-ce qui le lui interdirait ? On en discute. On en débat. On n’ostracise pas ! À force d’avoir chassé la raison du débat public, au profit réducteur de l’anathème moral, du sermon des belles âmes, on est maintenant dans la trouille des mots, dans la langue de bois, les quatre planches de la liberté de parole.
On est prisonnier de l’émotionnel, dont les orfèvres sont certains journalistes qui n’argumentent pas, mais se délectent l’ego en proférant des sentences définitives sur les uns et les autres. Alain Duhamel, de ce point de vue, peut fonder un séminaire. Il faut être attentif à l’épidémie émotionnelle qui explose dans les sites, dans les blogs, sur Twitter, dans les journaux, dans les émissions humoristiques, où la condamnation morale efface l’emploi de la raison. On remplace la réflexion, la discussion, le débat, par l’indignation morale dont tous les faux culs peuvent se draper. C’est si facile de condamner l’autre, on se fait ainsi l’âme belle pour le jour. La nuit garde ses secrets.
Les socialistes, et leurs émules, s’en sont fait une spécialité. Ils sont les grands indignés ! Eux seuls seraient du bon côté des pauvres, des victimes du racisme, de l’anti sémitisme, de la xénophobie, du sexisme…
L’avocat des victimes de Dutroux s’indignait, à juste titre, contre la pédophilie. On découvre qu’il est pédophile… Cette rhétorique de l’émotion est une hypocrisie qui empêche d’appréhender la réalité. Serait-ce une forme moderne de la propagande ?
En tout cas, l’un des meilleurs moyens de la combattre est de réclamer le retour de Jean François Khan, un honnête homme, qui dit ce qu’il pense, même si l’on ne pense pas comme lui. La France bouillonne du silence qu’on lui impose, des discours formatés qu’elle doit subir, d’un endoctrinement à l’école, dans les universités, toujours orienté dans le même sens, celui de la détestation de son histoire et d’elle-même. Les Français sont de bons élèves ; ils se taisent, bras croisés dans les rangs, par peur des coups de règles des professeurs vertueux. Tous les meurtriers le savent, la plus efficace technique pour tuer est l’usage du silencieux.
JFK, reviens dire du mal de nous. A se faire malmener, autant que ce soit par le talent !
Wallonie 2010 remercie particulièrement Maître Collard pour ses nombreuses autorisations à publier ses articles.
L’ auteur
Gilbert Collard est avocat au Barreau de Marseille, ancien secrétaire de la conférence et Chevalier des Arts et Lettres. Il est Président du MOSC (Mouvement pour l’Organisation de la Société Civile).
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